17 novembre : une mobilisation encore virtuelle mais foisonnante sur fond de peur gouvernementale

Le Poing Publié le 14 novembre 2018 à 12:43 (mis à jour le 25 février 2019 à 20:07)

À quatre jours de la mobilisation du 17 novembre, le gouvernement Macron semble prendre peur face à l’ampleur des préparatifs sur les réseaux sociaux. Une réunion s’est ainsi tenue hier matin à Matignon sur le sujet, les ministres promettant de lâcher du lest pour apaiser la colère montante par des mesures atténuant les effets de la hausse du carburant. De l’autre main, le ministère de l’Intérieur Castaner se prépare à la répression de ceux qui sont prêts à bloquer efficacement l’économie.

Une colère montante légitime mais fourre-tout

Le mouvement de blocage, pour le moment essentiellement virtuel, voit effectivement son nombre de partisans gonfler sur Facebook, avec près de 7 millions de vues et 700 évènements prévus sur la carte interactive des rassemblements, un net élargissement du mécontentement au delà de la question de l’essence, et des discussions à foison sur les suites à y donner… Et même quelques annonces d’actions plus ambitieuses comme des blocages autour de certaines raffineries. Comme dans les Bouches de Rhône où les gilets jaunes veulent aussi occuper le pont de Martigues et les accès des raffineries de la Mède à Fos jusqu’à lundi matin ! Dans le même temps, Le Monde publiait hier un entretien avec certains organisateurs du mouvement en Seine et Marne, pour qui « le rendez-vous sera aux abords du périph mais, clairement, l’objectif, c’est de monter sur l’Elysée ».

Comme de nombreuses grandes surfaces, un Intermarché à proximité de Toulouse a annoncé par de grandes banderoles sur sa devanture la fermeture de sa station essence en solidarité avec le mouvement du 17… Alors même que l’enseigne étouffe des producteurs laitiers qui participeront à la mobilisation par des conditions d’achat iniques ! Plus de 500 postes vont disparaître dans la filiale de logistique alimentaire (ITM LAI) du distributeur dans le cadre d’un plan social destiné à « réduire les coûts ». Un plan stratégique qui repose sur la fermeture de six bases logistiques d’ici fin 2021 et qui, encore une fois, impactera directement certaines des personnes légitimes à exprimer leur colère samedi.

En attendant, certains gilets jaunes ne patientent pas jusqu’au jour J : jeudi soir, 150 d’entre eux manifestaient à Béziers et dimanche des actions on déjà eu lieu dans plusieurs départements français, comme sur l’A62 à proximité d’Agen ou près de la Roche sur Yon en Vendée. Entre dix et quinze rassemblements sont pour le moment prévus le 17 dans l’Hérault, principalement autour de Lodève, Bédarieux, Béziers, Sète, Balaruc, Mèze, Lunel et Montpellier. Un texte signé d’« individus en colère » appelle par ailleurs à une réunion ce mercredi soir à 20h30 à la librairie Scrupule (26 rue du faubourg Figuerolles).

L’exécutif veut sortir de la crise qui s’annonce

Lundi matin une réunion sur le sujet à effectivement réunie les ministres à Matignon. Signe que la mobilisation collective est puissante, avant même le début des hostilités le gouvernement commence à plancher sur des pseudo-solutions atténuant les effets de la hausse du prix des carburants ! Un compte rendu public des arbitrages est promis pour mercredi, jour du conseil des ministres. D’après une source parlementaire proche de la majorité, quelques centaines de millions d’euros sont déjà débloqués pour l’épineux dossier. Parmi les propositions déjà avancées : la généralisation de l’aide au transport de 20 euros par mois mise en place dans les Hauts de France pour les personnes travaillant à plus de 30 kilomètres de leur domicile, et la revalorisation de la prime à la conversion censée aider les gens à remplacer leur vieille voiture plus polluante par un modèle neuf et “vert”.  Alors même que la construction d’une voiture, si propre soit-elle, est aussi voire plus polluante qu’une décennie passée à rouler avec un vieux tacot ! Business ou écologie, il faut choisir !

De l’autre main l’exécutif est disposé à se montrer plus ferme en cas de mouvement sérieux. « Partout où il y aura un blocage total, nous interviendrons. » C’est sur ces doux mots de Castaner sur BFMTV que nous nous sommes réveillés ce matin. « Il y aura d’abord des discussions et ensuite il y aura, plus fermement si c’est nécessaire, le fait de faire dégager la route.», a ajouté le ministre de l’Intérieur.

Ce mouvement saura-t-il donner un débouché concret aux discussions foisonnantes tenues sur les réseaux sociaux ? Qui entendrons-nous le plus : les smicards étouffés par la hausse du prix de la vie ou certains acteurs patronaux en quête de baisse des coûts ayant jusqu’ici applaudis à toutes les mesures anti-salariés ? Une jonction avec les écologistes contre les vrais pollueurs qui bénéficient des exonérations fiscales de l’État , comme Total, saura-t-elle se mettre en place ? Les gilets jaunes parviendront-ils à définir collectivement des objectifs structurants tout en évitant le piège de la récupération politique ? Pour le savoir, rendez-vous samedi et, peut-être, les jours suivants…

Pour en savoir plus, entre autres sur la réunion appelée mercredi soir par « des individus en colère »,  c’est ici !

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