Acte VIII. À Montpellier, les gilets jaunes ont tenu tête à la police du matin au soir

Le Poing Publié le 5 janvier 2019 à 19:59 (mis à jour le 25 février 2019 à 17:45)

Folle journée aujourd’hui à Montpellier ! Plus de 2000 gilets jaunes ont manifesté dans le centre-ville, soit deux fois plus que la semaine dernière. Qui osera encore parler d’essoufflement ? Dès 10h ce matin, les gilets jaunes sont dans la place. Cette fois-ci, nombre d’entre eux sont venus équipés : lunette de protection, casque, masque à gaz, etc. Plusieurs équipes de street-médics (médecins de rue) sont aux aguets. Les visages des blessés de la semaine dernière sont encore gravés dans les esprits, et imprimés sur des pancartes brandies par des manifestants. Les gens sont déterminés à ne plus se laisser faire.

Devant la gare Saint-Roch, vers 11h30, un manifestant est atteint au visage par un tir de LBD40. Dans la confusion, des CRS donnent des coups de pieds au blessé, alors qu’il est au sol. Au même moment, une grenade GLI-F4, facilement reconnaissable à l’explosion spectaculaire que produit sa charge de TNT, est balancée dans la foule. Plus de peur que de mal pour cette fois, mais ce modèle est responsable depuis le début du mouvement de plusieurs mains arrachées, à Paris, Bordeaux ou Tours

À 14h, les gilets jaunes partent vers la préfecture prendre des nouvelles des CRS. Les feux d’artifice répondent aux grenades lacrymogènes. Un beau bordel !

Retour à la gare. Surprise : aucun policier ne protège l’entrée. Après un petit moment de flottement, les gilets jaunes remontent la ligne 1 du tramway. La grille qui bloquait le pont-piéton d’accès à la gare est arrachée. Les gilets jaunes courent sur le pont et font détaler les policiers comme des lapins ! Pendant ce temps-là, une barricade s’enflamme dans la rue des Deux Ponts, celle qui longe l’arrière de la gare, et des gilets jaunes empruntent une deuxième entrée pour accéder à la gare. À l’intérieur de celle-ci, un message sonore répète en boucle : « activation code 18, activation code 18… » Les policiers finissent par repousser tout ce beau monde à grands coups de grenades lacrymogènes, mais les gilets jaunes présents du côté Écusson et du côté de l’entrée de la gare ne laissent pas tomber leurs camarades.

Les CRS, sous pression, se retrouvent encerclés par trois cortèges, ce qui permet aux manifestants de passer de l’autre côté du pont de s’échapper. Une des équipes de street-médics est visée par des tirs de LBD40 et l’un d’eux est touché au ventre… Les gilets jaunes repartent vers la préfecture. Des distributeurs et des vitrines de banques sont défoncés ici ou là, et quelques pavés sont jetés sur le pare-brise d’une voiture de la TAM.

Place Jean-Jaurès, c’est le chaos : tout ce qui peut servir de projectile est repéré, stocké, et jeté sur la petite ligne de CRS postée dans la rue de l’Aiguillerie. Des gilets jaunes ingénieux se saisissent d’un parasol géant pour avancer vers les policiers, ce qui permet de balancer des pavés tout en étant protégé. On l’apprendra plus tard, mais les CRS ont rejeté les pavés tombés en direction des gilets jaunes ! Quelques grenades de désencerclement éclatent. Les tambourins et la graïle (hautbois languedocien) apportent un peu de douceur à la scène.

Dans la confusion, des gilets jaunes aident des commerçants à remballer leurs tables et leurs chaises.

D’autres CRS, postés en haut de la rue de la Loge, bombardent les gilets jaunes de grenades lacrymogènes fortement dosées. Les forces de l’ordre seront obligées de reculer plusieurs fois devant la détermination des protestataires. Une dernière charge fera finalement fuir les gilets jaunes, qui repartent vers la place de la Comédie sous un déluge de grenades de désencerclement. Une manifestante tombée au sol à ce moment sera rouée de coups par quatre ou cinq CRS : cinq points de suture au crâne et 5 jours d’ITT, selon nos informations ! Une fois le nuage de gaz dissipé, des gilets jaunes déterminés remontent à l’assaut.

Encore une fois repoussés, ils refluent vers la Comédie, où un feu est allumé, avant de prendre la direction du Peyrou via le jeu de Paume. La nuit tombe, de nombreux feux sont allumés pour ralentir la police qui vient de la préfecture. Un incendie s’embrase sur les grilles de la cour d’appel. Après plusieurs charges, les manifestants, encore 200 ou 300, sont repoussés sur le boulevard du Jeu de Paume. Ils descendent jusqu’à la gare, puis retournent à la Comédie, semant de nombreuses petites barricades enflammées faites de barrières et de poubelles. Les derniers manifestants seront dispersés à la Comédie par une charge de la BAC.

Côté slogan, on notera les indémodables « Tous ensemble ! », « Résistance ! », « Tout le monde déteste la police », et quelques Marseillaise lancées ici ou là

Résultat des courses : au moins 5 interpellations et au moins un gilet jaune hospitalisé (touché au LBD40 devant la gare), sans compter les blessés dit légers. La préfecture parle de quatre policiers blessés, dont… le commissaire Patrice Buil, chef de la sûreté départementale de l’Hérault !

1789… 2019 ?

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