Gilets jaunes : la « Manif pour Tous » manipule une consultation en ligne à des fins politiciennes

Le Poing Publié le 8 janvier 2019 à 15:10 (mis à jour le 25 février 2019 à 17:35)

Le mouvement des gilets jaunes est inédit, prenant des formes multiples et portant des revendications variées. Plusieurs initiatives ont vu le jour pour donner une cohérence au mouvement en mettant en avant une ou plusieurs revendications consensuelles, celle du RIC (référendum d’initiative citoyenne) étant celle qui recueille le plus de succès sur le terrain. Au niveau institutionnel, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a mis en place une consultation en ligne participative en direction des gilets jaunes mais ouverte à tous : chaque internaute pouvait proposer une mesure et voter pour élire les plus populaires. L’initiative est louable : il s’agissait de favoriser la démocratie en laissant la plus grande liberté aux participants, sur la base de la bonne foi. Mais l’extrême-droite a mobilisé ses réseaux pour faire monter artificiellement des propositions homophobes qui, sur le terrain, ne sont jamais évoquées.

Tentatives de récupérations politiciennes d’extrême-droite

Des mails ont été massivement envoyés pour inviter les militants proches de la « Manif pour tous » (association homophobe de droite) à spammer le site du CESE(1). Raison pour laquelle la revendication qui est arrivée en tête à l’issue de la consultation, vendredi 4 janvier à minuit, est l’abrogation de la loi Taubira, qui élargit le mariage aux personnes de même sexe. Résultat de ce sabotage : la consultation a été tournée en ridicule, les gilets jaunes qui s’y sont investis ont été lésés, et les médias se sont servis de cette manipulation pour casser du sucre sur le dos des gilets jaunes en les faisant passer pour des fascistes. Cette manœuvre n’est pas sans rappeler la récupération opérée en décembre par le leader du parti « Les Patriotes », Florian Philippot, qui a déposé la marque « Les Gilets Jaunes » pour tenter de se l’approprier(2) – au grand dam des manifestants.

Des revendications sociales hermétiques aux lubies fascistes

La mobilisation de l’extrême-droite sur internet et en coulisses cache mal son incapacité à se mobiliser sur le terrain. Certains chercheurs en sciences sociales nomment ce phénomène le « surinvestissement compensatoire » : faute de pouvoir occuper la rue, les militants d’extrême-droite prennent plus de place sur internet. Et les médias dominants se servent des tentatives d’infiltrations artificielles – numériques – de l’extrême-droite au sein des gilets jaunes pour tenter de décrédibiliser le mouvement. Mais la sauce ne prend pas : les gilets jaunes présents sur les points de blocages ne peuvent que constater l’absence de militants d’extrême-droite. Les rares militants fascistes qui ont participé à des manifestations de gilets jaunes en chantant leurs slogans racistes se sont fait expulser des cortèges avec pertes et fracas, notamment à Paris et Bordeaux. Cela peut s’expliquer aisément : les femmes gilets jaunes organisent des manifestations quand l’extrême-droite reste figée sur des positions anti-féministes, les gilets jaunes défendent des revendications sociales quand l’extrême-droite souhaiterait développer un argumentaire identitaire coupé des réalités populaires et les gilets jaunes s’attaquent aux policiers quand l’extrême-droite les défend (le très droitier président du parti « Les Républicains » Laurent Wauquiez, après avoir enfilé un gilet jaune, demande maintenant le retour de l’état d’urgence pour lutter contre les « casseurs »(3), et Marine Le Pen, traditionnellement la meilleure alliée des policiers, ne sait désormais plus quoi dire face aux images d’insurrection).

Nous ne le répéterons jamais assez : l’extrême-droite a toujours été et restera un frein aux mobilisations sociales. Réjouissons-nous du fait que leurs misérables tentatives de récupération soient un échec, et laissons-les patauger dans leur impuissance.

Sources :

(1) « L’abrogation du mariage pour tous est-elle une vraie revendication des gilets jaunes? », Libération, 8 janvier 2019.
(2) « Florian Philippot dépose la marque ‘‘Les Gilets Jaunes’’ », Le Monde, 27 décembre 2018.
(3) « Frédéric Péchenard : ‘‘en France, la doctrine du maintien de l’ordre est dépassée’’ », France Inter, 8 janvier 2019.

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