Un gilet jaune condamné à 4 mois de prison ferme à Montpellier, dix placés sous contrôle judiciaire à Nîmes

Le Poing Publié le 15 janvier 2019 à 10:49 (mis à jour le 25 février 2019 à 16:28)
Le succès des manifestations des gilets jaunes n’est pas du goût des procureurs et des juges, qui manient le bâton avec plus ou moins de fermeté pour réfréner les ardeurs des révoltés. Pas de nouvelle des personnes interpellées à Montpellier lors de l’acte IX, mais un gilet jaune a été incarcéré hier pour des accusations concernant les actes VII et VIII. Toujours hier, dix personnes – interpellées à Nîmes lors de l’acte IX – ont été libérées sous contrôle judiciaire.

« Je n’ai pas apprécié les tirs de LBD et de lacrymos »

Un trentenaire comparaissait ce lundi 14 janvier devant le tribunal de grande instance de Montpellier pour quatre délits reconnus avoir été commis pendant les actes VII et VIII des gilets jaunes à Montpellier : participation à un attroupement en vue de commettre des violences et des dégradations, outrage sur personne dépositaire de l’autorité publique, violence sur personne dépositaire de l’autorité publique n’ayant pas entrainé d’interruption temporaire de travail et dégradation – cette dernière accusation ne concernant que l’acte VII. Le prévenu a reconnu avoir jeté des pierres, enflammé une poubelle, et brandi son majeur en direction des policiers. « Je n’ai pas apprécié les tirs de LBD et de lacrymos, donc j’ai riposté. Les barricades, c’était pour éviter de se faire charger par les CRS, tout simplement. » Après avoir épluché les images des caméras de vidéosurveillance, les policiers l’ont dépeint comme un « meneur » : « C’est faux, chez nous – les gilets jaunes –, on n’a pas de meneur ! » Ses revendications sont posées : « Je suis intérimaire et ça m’empêche d’avoir un appartement, c’est insupportable ! » Pour le sermonner, le procureur manque d’imagination : « Quand vous voyez un feu rouge, vous vous arrêtez ? Et bien un policier, c’est pareil, quand il vous dit de vous disperser, vous partez ! Les policiers ne se lèvent pas le matin en se disant ‘‘chouette, aujourd’hui je vais utiliser mon flashball !’’» L’avocat du prévenu a divagué : « Les gilets jaunes, ça commence avec Poujade(1), et ça se termine avec Robespierre(2) ! Mon client a simplement été pris par l’effet de meute, c’est tout ! » Verdict : quatre mois de prison ferme avec mandat de dépôt(3), direction la prison de Villeneuve-lès-Maguelone.

Relaxe

Pendant la même audience, un étudiant a été relaxé pour deux accusations de participation à un attroupement en vue de commettre des violences et des dégradations et dissimulation du visage. Le procureur lui reprochait d’avoir commis ces délits le 5 décembre aux abords du lycée Mermoz, lors du mouvement de protestation des lycéens.

Placements sous contrôle judiciaire à Nîmes

Hier, dix gilets jaunes interpellés à Nîmes lors de l’acte IX ont été présentés devant un juge dans le cadre d’une comparution immédiate. La plupart comparaissaient pour des accusations de violence et d’intimidation sur personne dépositaire de l’autorité publique. Ils ont tous été placés sous contrôle judiciaire, malgré les réquisitions sévères du procureur réclamant la détention provisoire. Leur procès se tiendra le 5 février à 9h au palais de justice de Nîmes. Parmi les personnes libérées figure Julien, journaliste au Poing, obligé de pointer une fois le mardi et deux fois le samedi au commissariat de Montpellier. Cette décision a provoqué des scènes de liesse devant le palais de justice.

Notes :

(1) Le poujadisme, du nom de Pierre Poujade, est un mouvement politique et syndical français apparu en 1953 dans le Lot et qui a disparu en 1958. Ce mouvement revendiquait la défense des commerçants et des artisans, qu’il considérait comme mis en danger par le développement des grandes surfaces dans la France de l’après-guerre, et condamnait l’inefficacité du parlementarisme tel que pratiqué sous la Quatrième République. Les termes de poujadisme ou de mouvement Poujade désignent les activités de l’Union de défense des commerçants et artisans, le syndicat dirigé par Pierre Poujade, et de l’Union et fraternité française, bannière utilisée par Poujade et ses partisans pour participer aux élections. Par extension, le terme poujadisme est devenu un terme péjoratif désignant un mouvement politique corporatiste à tendance réactionnaire des classes moyennes à supérieures ou « conservatisme de petits-bourgeois ».
(2) Maximilien Robespierre, est un avocat et homme politique français. Robespierre est sans doute le personnage le plus controversé de la Révolution française. Ses détracteurs (les Thermidoriens, les fondateurs de la IIIe République et les historiens de « l’école libérale » dont le chef de file fut François Furet) soulignent son rôle dans l’instauration de la Terreur et la nature autoritaire du Comité de salut public. Pour d’autres, Robespierre tenta de limiter les excès de la Terreur, et fut avant tout un défenseur de la paix, un champion de la démocratie directe et de la justice sociale, un porte-parole des pauvres, et l’un des acteurs de la première abolition de l’esclavage en France.
(3) Le mandat de dépôt est en France l’acte juridique décerné par la juridiction de jugement ou le juge des libertés et de la détention qui ordonne « au chef de l’établissement pénitentiaire de recevoir et de détenir la personne à l’encontre de laquelle il est décerné ». Quand une personne est condamnée à de la prison ferme avec mandat de dépôt, cela signifie donc qu’elle va effectivement être incarcérée. En revanche, lorsqu’une personne est condamnée à de la prison ferme sans mandat de dépôt, cela signifie qu’elle va passer devant un juge d’application des peines (JAP) qui va décider d’aménager ou non la peine (bracelet électronique, semi-liberté…)

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